La fête au village, autrefois
FÊTE ANNUELLE
On savait faire la fête, à Norgeat, au début du siècle dernier.
Pour s’en convaincre, il suffit de consulter le programme des festivités de Juin 1914.
Trois jours de fête, avec : retraite aux flambeaux, concert de la Société Philarmonique de Norgeat, bal, course aux ânes, course au sac, jeux divers, grande farandole et lâcher du ballon « le Miglosien ».
Louis Pujol (poète et écrivain Norgeatois – 1903/1996), a fourni quelques renseignements complémentaires dans son ouvrage « Miclos – A las aurièros de tems bielh« , (p 33).
« …Le jour de la fête, les deux musiques de Norgeat (celle de l’instituteur Casimir Truel et celle d’Hilaire Gabarre de la Lhibertè), se regroupaient pour faire le tour du village, à grand bruit de basses et de grosses caisses, et donnaient un concert comme le font les grands orchestres dans les villes. Le bal qui suivait faisait danser toute la jeunesse de la commune et même celle des villages voisins, qui passait les cols à travers la montagne.
Le dernier jour, après la course aux ânes et la course au sac, une Montgolfière, comme on disait, était lâchée dans le ciel. Elle portait aux gens de Foix, quand l’autan soufflait des Lhabairiels, le nom de « Miglos » et le salut de toute la population de cette jolie vallée…« .
Ma grand-mère Madeleine (née en 1895) racontait également que, dans sa jeunesse, la fête avait lieu le 14 Janvier, jour de la Saint Hilaire, le saint patron du village et de la commune. Le bal se tenait dans la vaste cour de la maison Gabarre (La Lhibertè), près de la place. En ce temps là, il y avait beaucoup de neige l’hiver. Aussi, après avoir bien nettoyé la cour, on la recouvrait d’une sorte de bâche, confectionnée avec plusieurs draps cousus ensemble (prêtés par chaque famille, à tour de rôle), tendue sur des cordes à foin fixées aux quatre coins. L’aire de danse était ainsi abritée de la neige et du froid.
Voilà plus d’un quart de siècle que la fête à Norgeat n’a plus lieu…
Depuis cette époque, la fête communale de Miglos est organisée chaque année à la mi-Août.
A signaler, pour l’anecdote, que la SACEM « sévit » depuis déjà fort longtemps. Ainsi, lors de la délibération municipale du 29 Janvier 1934, « le maire (Honoré Pujol) expose qu’à l’occasion des fêtes publiques la commune est tenue de payer pour la musique les droits d’auteurs, qui s’élèvent pour chaque jour de fête à soixante six francs et qu’il y aurait avantage à souscrire un abonnement à la société des auteurs et compositeurs, chargée de percevoir les droits« . Préconisation adoptée.
L’Annuaire de l’Ariège répertoriait aussi la fête de Miglos. Pour les années 1866 & 1877, par exemple, on relève : « Miglos – La fête est placée sous l’invocation de St Hilaire, le 14 Janvier. Elle est renvoyée au dimanche suivant et dure 3 jours« .
G.L. Janvier 2010
CARNAVAL
Toujours au début du XXe siècle, Carnaval offrait aussi à la population de la commune, et plus particulièrement à la jeunesse, l’occasion de se divertir, en perpétuant une tradition ancienne.
En témoigne la carte écrite à cette époque par Alfrédine (un prénom fort original au demeurant) « venue villégiaturer » à Miglos.
On y relève :
… « Les fêtes de Carnaval sont splendides cette année. Les masques abondent et leurs costumes sont du meilleur goût. Avec un peu d’indulgence on se croirait vraiment transporté à Venise »….
À partir de début Février, les jeunes avaient pour habitude de se costumer, le plus souvent avec des habits de l’ancien temps. Ils dissimulaient également leur visage sous un masque ou un foulard ne laissant entrevoir que les yeux et la bouche.
Ainsi déguisés, munis d’un grand bâton de berger, ils déambulaient dans le village en signalant leur approche au son de trompes et de cloches de vaches.
Par petits groupes, et souvent constitués en couples (des garçons se travestissaient fréquemment en femme), ils allaient frapper à la porte des maisons, après la tombée de la nuit, lorsque les occupants étaient réunis autour de l’âtre pour la veillée.
Leur entrée tapageuse ne manquait pas d’apeurer les enfants qui n’étaient pas encore couchés. Tout en gesticulant au milieu de la cuisine, ils faisaient admirer leurs déguisements. S’ils débitaient quelques fadaises ou répondaient aux questions posées, c’était d’une voix déformée afin d’éviter d’être reconnus. Après quoi, ils repartaient, toujours aussi bruyamment, vers une autre maison.
Mardi Gras marquait la fin de cette période festive.
Ce jour-là, tous les jeunes de Norgeat se déguisaient. Dans une ambiance de liesse, ils faisaient alors le tour du village pour montrer à tous « Carnaval« , un mannequin costumé de façon grotesque et empaillé d’avoine. Certains membres du groupe étaient chargés de la quête des œufs. À chaque maison visitée, ils tendaient un panier à la maîtresse du logis, qui y déposait quelques œufs et parfois même du saucisson ou du jambon.
À la fin de la soirée, « Carnaval » était conduit jusqu’aux Prats d’Abalh (après le village côté Arquizat) dans un joyeux tintamarre, pour être noyé dans le ruisseau.
Pendant le sacrifice, les participants chantaient à tue-tête le refrain rituel :
Adiu paure, paure, paure,
Adiu paure Carnabal.
Tu t’en bas e ieu demori
Tu t’en bas per l’aigo abalh.
Nous deichos en eritatge
Las patanos et les gras d’alh.
T’en es anat e ieu demori
Per manjà la soupo a l’oli.
Adieu pauvre, pauvre, pauvre,
Adieu pauvre Carnaval.
Tu t’en vas et moi je reste
Tu t’en vas au fil de l’eau.
Tu nous laisses en héritage
Les patates et les grains d’ail.
Tu es parti et moi je reste
Pour manger la soupe à l’huile.
Carnaval emporté par le torrent, le calme revenait enfin…
Mais la journée n’était cependant pas finie pour les garçons. Ils se retrouvaient à l’auberge du village, chez « La Lhiberté« , autour d’une imposante omelette faite avec le produit de la quête des œufs. Une bien agréable façon de terminer la fête…
Les jeunes-filles n’étaient pas conviées aux réjouissances car, en ce temps-là, il était inconvenant qu’elles fréquentent le café après la tombée de la nuit.
Madeleine, mon aïeule, se rappelait parfaitement des Carnavals de son enfance ; c’est elle qui m’a d’ailleurs appris la chanson « Adiu paure Carnabal« .
Louis Pujol parle aussi de cette fête dans l’ouvrage précédemment cité (p.65).
G.L. Novembre 2012